Billet de blogue rédigé par Edouard Beigbeder, un représentant d’UNICEF Bangladesh

Dans la région reculée de Kurigram, dans le nord du pays, une jeune mère en larmes serre très fort une photo de son enfant qui s’est noyé lors des inondations dévastatrices qui ont frappé le Bangladesh en 2017.

Sur une île du fleuve Brahmaputra, Shumi, âgé de 15 ans, va à l’école en suivant un sentier étroit que l’érosion ne cesse de dévorer.

Dans un village situé en bordure de la baie du Bengale, Maroof, âgé de 11 ans, se souvient d’un ami qui a été emporté par la marée montante.

Mohamed Chotol, âgé de 13 ans, gagne sa vie en ramassant des bouteilles de plastique jetées dans les rues jonchées de déchets d’un bidonville de Dhaka.

Les chiffres sont saisissants : près de 12 millions d’enfants au Bangladesh vivent actuellement autour de systèmes fluviaux qui risquent de plus en plus de provoquer des inondations potentiellement mortelles. Par ailleurs, 4,5 autres millions d’enfants vivent dans des zones côtières régulièrement frappées par de puissants cyclones; près d’un demi-million d’entre eux sont des réfugiés rohingyas qui n’ont que du bambou et du plastique pour se protéger des tempêtes violentes. Trois autres millions d’enfants vivent à l’intérieur des terres, où les communautés agricoles font face à des périodes de sécheresse de plus en plus nombreuses.

On estime qu’au total 19,4 millions d’enfants répartis dans 20 des 64 districts du Bangladesh sont exposés aux conséquences les plus néfastes et dangereuses des changements climatiques à court ou à long terme. Plus de cinq millions d’entre eux sont âgés de moins de cinq ans. Les changements climatiques minent déjà leur vie et réduisent leurs possibilités d’avoir un avenir meilleur.

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Une famille laissée sans abri par le cyclone Aila attend de l’aide à Koira, dans le district de Khulna. [© UNICEF/UN0286436/Uddin]

Les effets des changements climatiques poussent à bout les familles de nombreuses communautés qui comptent parmi les plus pauvres du pays, les empêchant de bien se loger, de nourrir leurs enfants, et de les garder en bonne santé et instruits.

De nombreux enfants migrants sont chassés de leur domicile et de leur école et sont déplacés dans des bidonvilles surpeuplés en raison d’inondations dévastatrices ou de l’érosion généralisée des berges. Pour un grand nombre d’enfants et de jeunes, en particulier pour ceux et celles qui n’ont pas de compétences de base, survivre dans cet environnement difficile signifie accepter des emplois mal payés, dangereux et qui les exposent au risque d’exploitation. Pour les filles, cela peut signifier se marier ou devenir des travailleuses du sexe.

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Réfugiée du sud du Bangladesh en raison des changements climatiques, Shafiya a été mariée alors qu’elle était âgée de 14 ans. Quatre ans plus tard, elle attend son premier enfant. [© UNICEF/UN0286443/Brown]

Bien que ces risques s’aggravent, ils ne sont pas nouveaux. La stratégie et le plan d’action du Bangladesh relatifs aux changements climatiques de 2009 en parlent clairement. Depuis, la stratégie a été le cadre de progrès impressionnants réalisés par le gouvernement, ses partenaires et l’ensemble de la société, dont un nombre croissant de jeunes, afin de renforcer la résilience aux changements climatiques.

Mais il y a encore beaucoup à faire pour éviter le danger que représentent les changements climatiques pour le Bangladesh et ses objectifs de développement à long terme.

La population bangladaise a développé des capacités de résilience admirables pour faire face aux forces de la nature. Les énormes investissements dans la préparation aux catastrophes et la réduction des risquent ont porté leurs fruits, mais la menace continue d’augmenter.

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Maroof, âgé de 11 ans, se trouve à l'emplacement de ce qui était sa maison, avant que celle-ci ne soit emportée par les inondations saisonnières. [© UNICEF/UN0286426/Lawson Tancred]

Maroof Hussein, âgé de 11 ans, se souvient parfaitement des événements de juin 2017, lorsque des inondations saisonnières exceptionnellement fortes ont dévasté son village de Nizampur, dans le district de Patuakhali situé en bordure de la baie du Bengale. « Mon école et ma maison ont été inondées en même temps. Je suis allé me coucher et je me suis réveillé alors que les eaux de crue arrivaient. C’était terrifiant », se rappelle-t-il. Maroof et sa famille ont réussi à s’échapper, mais son ami Iqbal, âgé de huit ans, a été emporté par la mer et s’est noyé.

En octobre 2018, le groupe de spécialistes intergouvernemental sur les changements climatiques a publié son avertissement le plus complet sur les dangers imminents que la hausse des températures dans le monde représente pour l’humanité. Au Bangladesh et dans le monde entier, nous devons placer les besoins des enfants au centre de nos réactions, avant que les effets les plus destructeurs des changements climatiques ne se produisent.